Biographie
Né en 1933 à Metz, Jean-Marie Straub fait ses études
dans sa ville natale, puis à Strasbourg. Au début des années
cinquante, il s'implique dans la ''Chambre noi-re'', ciné-club créé
par Gérard Schnitzler au cinéma ''Le Modern'' à Montigny-les-Metz,
puis au ''Royal'', rue Gambetta. Il se lie avec François Truffaut , venu
à Metz pour présenter ''Under Capricorn'' de Alfred Hitchcock en
1954 . C'est cette année-là qu'il rencontre à Paris Danièle
Huillet. En 1955, il est assistant de Jacques Ri-vette pour son court-métrage
Le coup du berger. En 1958, il refuse son incorporation pour la guerre d'Al-gérie,
est condamné à la prison par le tribunal militaire et s'enfuit en
Allemagne avec Danièle Huillet ; il sera réhabilité en 1971.
C'est en 1962, en Allemagne, que commence leur oeuvre commune avec Machorka Muff,
d'après Heinrich Böll. Comme dans leur premier long métrage,
Non réconciliés, ils y interrogent la survivance du nazisme dans
l'Allemagne d'après-guerre. En 1967, Chronique d'Anna Magdalena Bach les
impose comme les premiers représentants d'un nouveau cinéma. Ils
s' interrogent sur la société contemporaine à travers des
personnages et des mythes historiques: Moïse et Aa-ron, Leçons d'histoire,
La mort d'Empédocle, Antigone. Trop tôt trop tard, Amerika/Rapport
de classes, ques-tionnent également la lutte des classes. Césare
Pavese, le grand romancier piémontais, inspirera nombre de leurs films.
A partir de 1998, Danièle Huillet et Jean-Marie Straub sont aussi artistes
en résidence, comme metteurs en scène de théâtre, à
Buti en Italie. Jean-Marie Straub enseigne, comme artiste professeur invité,
à l'école nationale d'art contemporain du Fresnoy. Danièle
Huillet est décédée en octobre 2006. Cette rétrospective
lui est dédiée.
Le cinéma
de Danièle Huillet et Jean-Marie Straub C'est par la rencontre
avec les plus grands : César Pavese (Ces rencontres avec eux, le genou
d'Artémide, Streghe femmes entre elles), Johan Sébastien Bach (Chronique
d'Anna Magdalena Bach), Arnold Schönberg (Moïse et Aa-ron, Du jour au
lendemain), Paul Cézanne (Une visite au Louvre), Franz Kafka (Amerika/Rapport
de classes), Hein-rich Böll (Non réconciliés), Hölderlin
(La mort d'Empédo-cle), que l'oeuvre des Straub, depuis près de
cinquante ans, s'est forgée. La beauté et la force de leur cinéma
tient à son économie essentielle dans tous les moments de la création
: depuis la conception, souvent inspirée de la lec-ture des grandes oeuvres
musicales, picturales, littéraires, au tournage et aux conditions de production
et de diffu-sion. Ils se définissent comme des artisans du cinéma,
contre l'industrie, les postures et les impostures du cinéma majo-ritaire.
Leur cinéma se veut respectueux de la réalité de l'espace
visuel et sonore, du temps, du travail des acteurs, grâce aux plans rigoureusement
construits et articulés, au soin extrême apporté au son et
l'image. Il refuse les artifices grâce aux coupes franches, au son direct,
à la focale pro-che de la vision humaine, au travail des acteurs non pro-fessionnels:
voilà un cinéma magnifique, réputé difficile, au fond
simple et pur, toujours situé, selon le propos de Jean-Marie Straub lui-même,
au ''point stratégiquement juste ''. Un cinéma essentiellement
poétique aussi qui nous resti-tue le monde dans les relations infinies
des personnages, de la musique, des textes, des paysages, des voix des bruits.
Un cinéma politique enfin, cinéma d'insoumis, dont le sujet est
la résistance acharnée à la consommation de masse, à
la colonisation des esprits et des corps, à la vio-lence sociale, à
la barbarie technologique à la destruction de la Terre. Reconnue, diffusée
dans le monde entier, leur oeuvre a été couronnée en septembre
2006 à la Mostra de Venise par le prix spécial du jury pour l'innovation
dans le langa-ge cinématographique. La première rétrospective
de leur oeuvre a été donnée au MOMA de New-York en 1978.
En 2007 un hommage a eu lieu au Reflet Médicis à Paris et à
la Cinémathèque Française. Oeuvre de référence
pour de nombreux réalisateurs (Jean-Luc Godard, Pedro Costa, Bruno Dumont
entre autres), elle est étudiée à l'Université, au
Japon, aux Etats-Unis, en Europe. Elle inspire les intellectuels les plus renommés.
Elle marque l'Histoire mondiale du Cinéma. |